La redistribution des revenus modifie la répartition primaire des revenus. En effet, les ménages doivent payer des impôts et des cotisations sociales, ils reçoivent des prestations sociales. Le revenu disponible des ménages désigne les sommes que les ménages peuvent affecter à la consommation ou à l’épargne après la redistribution. Deux grandes catégories d’acteurs économiques et sociaux interviennent dans la redistribution :les administrations publiques (État et collectivités locales), qui prélèvent des impôts pour financer la production de services non marchands, les organismes de protection sociale, gui prélèvent des cotisations et versent des prestations.
La redistribution des revenus
Le système redistributif et son évolution
Le système redistributif vise plusieurs objectifs :
- fournir à tous les services collectifs (éducation, justice. . .) ;
- corriger les inégalités de revenus ;
- fournir une assurance sociale contre les risques (maladie, chômage, vieillesse).
On peut distinguer la redistribution horizontale, qui vise à maintenir les ressources des individus frappés par des risques sociaux sans considération du revenu, et la redistribution verticale, qui cherche à réduire les inégalités sur l’échelle des revenus.
La redistribution n’a cessé de s’étendre, surtout depuis la généralisation des mécanismes de protection sociale à partir de 1945. Cette évolution traduit la montée de l’État providence, qui absorbe une part croissante des revenus. Actuellement, plus d’un tiers du PIB change de main du fait de la redistribution, et un tiers du revenu disponible en provient. La crise économique a conduit les revenus de transfert à progresser plus vite que la richesse nationale. La ponction sur des revenus primaires en a donc été d’autant plus forte.
Diverses interprétations théoriques sont faites de la justification économique de la redistribution. Pour le courant néoclassique, le marché peut produire des services sociaux plus efficacement que la tutelle étatique. En outre, les prestations et les prélèvements ont des effets pervers sur l’activité économique car ils modifient le résultat des préférences individuelles (préférence pour l’indemnité, oisiveté).
Keynes montre que toute action en faveur de la demande globale est favorable à l’activité. Or la redistribution vise à accroître les ressources des plus modestes, qui ont la propension à consommer la plus forte. On peut aussi interpréter cette montée comme une conséquence naturelle de l’enrichissement de la société, permettant de satisfaire des besoins de plus en plus évolués.
L’organisation et le financement de la redistribution des revenus
La redistribution passe en France par deux grandes voies : le budget de l’État et des collectivités locales d’une part, et les organismes de protection sociale d’autre part.
La fiscalité, issue chaque année de la loi de finances, intervient à différents niveaux dans la redistribution :
- les impôts sont affectés au financement des services non marchands,
- les impôts progressifs permettent une contribution redistributive,
- le budget de l’État subventionne les régimes de protection sociale.
Sa structure fait apparaître une forte prédominance des impôts indirects (taxe sur la valeur ajoutée, taxe intérieure sur les produits pétroliers. . .)
La protection sociale est financée par des cotisations, prélevées obligatoirement et assises sur les salaires. Une part est à la charge des employeurs, une autre à la charge des salariés. Des organismes paritaires (gérés conjointement par les organisations syndicales et patronales) sont à la tête des différentes caisses. Cependant, depuis 1 995, l’État peut officiellement orienter les recettes et les dépenses par le vote d’une loi au Parlement.
L’efficacité de la redistribution
L’effet de la redistribution n’est pas à la hauteur des sommes en jeu : les études montrent que si la redistribution horizontale joue son rôle, la redistribution verticale ne réduit que très peu les inégalités.
Plusieurs raisons peuvent l’expliquer :
- la montée des prélèvements proportionnels (TVA, CSG, CRDS, impôts locaux) au détriment de l’impôt progressif sur le revenu ;
- l’importance des prélèvements sur les revenus du travail (seule source de revenu pour les ménages modestes) et la faiblesse des prélèvements sur les revenus de la propriété ;
- le calcul de certaines prestations en fonction du revenu (retraites, indemnités chômage) ;
- le recours plus large des classes aisées aux revenus de transfert (retraite plus longue, dépenses médicales plus élevées. . .) et aux services non marchands (système éducatif).
L’efficacité macro-économique de la redistribution est controversée : pour certains, elle est un facteur de croissance qui permet d’amortir les effets de la crise en jouant un rôle « contracyclique ». Pour d’autres au contraire, la redistribution pèse sur le coût du travail, rigidifie le marché du travail, contribue à augmenter le chômage. En outre, les efforts de réduction des déficits budgétaires et sociaux menés en période de récession économique ont un effet « procyclique » d’aggravation du ralentissement.
La courbe de Laffer
L’économiste américain Arthur Laffer analyse la relation entre le taux d’imposition et les recettes fiscales. Pour lui, cette relation prend la forme d’une courbe en cloche :
Dans un premier temps, les recettes augmentent avec le taux d’imposition. Mais, à partir du seuil T0 (inférieur à 50 %), les recettes fiscales diminuent du fait du découragement des individus qui préfèrent alors augmenter leurs loisirs plutôt que leur revenus et leurs investissements. La production est alors ralentie du fait de l’excès de pression fiscale.
Cette courbe a été à la base des politiques fiscales libérales mises en œuvre dans les années quatre-vingt dans de nombreux pays, particulièrement aux États-Unis et au Royaume-Uni.
En quoi le système redistributif de revenus est-il en crise ?
Le système redistributif opère des prélèvements sur les revenus primaires et fournit des revenus de transfert et des services collectifs aux ménages. On peut lui assigner différents objectifs : redistribution horizontale et verticale, efficacité dans la production de services non marchands, soutien à l’activité économique. Or ce système est régulièrement remis en cause pour son incapacité à atteindre ses objectifs. Trois types de crises le concernent : une évidente crise de financement, une crise d’efficacité et une crise de légitimité.
• Le système redistributif fait face à une importante crise de financement. Les budgets publics subissent un effet de ciseaux : les dépenses augmentent alors que les recettes ont tendance à stagner, ce qui entraîne d’importants déficits. Les dépenses budgétaires, comme les dépenses sociales augmentent régulièrement depuis de nombreuses années sous l’influence de multiples facteurs : augmentation du chômage, élargissement du système éducatif, vieillissement de la population, pression des acteurs économiques et sociaux, montée de la pauvreté et de la précarité. . . Face à cette augmentation, les recettes stagnent. La plupart d’entre elles sont basées sur l’activité économique : impôts sur les bénéfices des sociétés, sur le revenu des ménages, taxe sur la valeur ajoutée. Elles stagnent donc quand l’activité faiblit. Par conséquent, les déficits augmentent depuis le début des années quatre-vingt-dix. Les ajustements ponctuels, qui prennent la forme de hausse des prélèvements et de diminution des prestations, ne résolvent que très temporairement le problème.
• Au-delà des problèmes financiers, le système redistributif semble faire face à une crise d’efficacité. Son effet redistributif est strictement limité à la redistribution » horizontale », c’est-à-dire au maintien de ressources pour les personnes touchées par les risques sociaux : des bien-portants vers les malades, des actifs occupés vers les chômeurs, des actifs vers les retraités. En revanche, l’objectif de redistribution » verticale », qui réduit les inégalités sur l’échelle des revenus, est très faiblement atteint, à la fois du fait de prélèvements peu progressifs et de prestations versées inégalitairement.
• Enfin, la redistribution est attaquée dans sa légitimité par le courant libéral, qui préconise une remise en cause du système. En effet, les prélèvements seraient à l’origine de nombreux dysfonctionnements (dissuasion à l’embauche et à l’investissement, atteinte à la liberté individuelle, découragement au travail. . .). Le système actuel serait donc nuisible à la performance économique.
kante
Je suis très très émue a la suite de la lecture et j’en voudrais encore et encore pour plus d’information